Dans un communiqué de presse du 27 août
dernier, Gabriel Nadeau-Dubois affirmait : « À partir de maintenant,
on va se faire entendre sur l’économie. » Voilà une très bonne nouvelle,
car les propositions de Québec solidaire en cette matière se révèlent
surprenantes et les électeurs seraient bien inspirés d’en prendre connaissance.
Car si la marque QS a réussi à se
positionner dans le cœur de nombreux progressistes comme dépositaire unique de
la vertu, au moment de choisir un gouvernement, on ne peut pas s’en tenir aux
objectifs affichés par les partis. On ne compte plus dans l’histoire le nombre
de partis animés de nobles ambitions qui ont finalement érigés des régimes désastreux
pour les droits de la personne et pour l’économie.
On peut difficilement remettre en cause la
volonté de QS de vouloir le mieux pour ses concitoyens, mais il serait temps de
creuser pour savoir comment il compte y arriver. Quoi de mieux que de fouiller
un peu dans le programme du parti, mis à jour au 11e congrès de mai
2016, qui incarne, « dans les sphères de l’économie, du travail et de
l’environnement, le rendez-vous auquel Québec solidaire convie la population
québécoise. »
Exit le capitalisme
Bien des progressistes croient que le
capitalisme, en dépit de ses limites, reste le meilleur système économique pour
favoriser le développement individuel et collectif. Ils croient que la combinaison
de la propriété privée et de l’intérêt personnel répond à un trait fondamental
de la nature humaine qui ne peut être ignoré. Ils constatent toutefois que le
capitalisme débridé est aussi source de misère et d’injustice et s’entendent
sur la nécessité pour l’État de l’encadrer. C’est quant à la nature et à
l’ampleur de l’encadrement optimal que les désaccords surviennent.
Mais chez QS, on va plus loin…
« Québec solidaire vise, à long
terme, la socialisation des
activités économiques. Ce processus de transformation sociale reposera,
notamment, sur une économie publique forte (secteur des services publics,
société d’État et nationalisation de grandes entreprises dans certains
secteurs stratégiques). On concède toutefois qu’«Une certaine place au secteur privé sera maintenue, particulièrement
en ce qui a trait aux PME.»
Quoique les PME constituent la très grande
majorité des entreprises d’ici, le Québec compte tout de même quelque 600
grandes entreprises représentant plus de 200 000 travailleurs.
La première question à GND est la
suivante : quelles entreprises parmi les Metro, Jean Coutu, CGI et les
autres seront nationalisées et exploitées par l’État québécois?
Gestion démocratique?
Le programme ajoute que les entreprises
nationalisées “devront s’inscrire dans le cadre d’une planification nationale et
démocratique et d’un mode de gestion décentralisée. Aussi, l’administration générale et la fixation
d’objectifs particuliers de ces entreprises devront avoir lieu au sein d’instances démocratiques régionales ou
nationales dont la composition assurera une représentation réelle de
l’ensemble de la société (salarié-es de l’entreprise, représentant-es de
l’État, élu-es régionaux, groupes de citoyen-nes, Premières Nations, etc.).
Finalement, ce n’est pas le gouvernement ou ses hauts fonctionnaires qui
devront voir à l’organisation du travail au sein de ces entreprises, mais les
employé-es eux-mêmes (autogestion).”
Les entreprises québécoises doivent être de
plus en plus agiles pour faire leur place dans un environnement où le
changement s’accélère sans cesse. C’est un défi. Quant à QS, champion autoproclamé
des processus de prise de décision démocratiques, il a quand même mis plus d’un
an pour répondre à la proposition de convergence souverainiste…
Dans ce contexte, la seconde question à GND
est la suivante : concrètement, à quoi ressembleraient le mode de « planification
nationale », les « instances démocratiques régionales et nationales »
et l’« autogestion » des entreprises nationalisées?
État propriétaire
Sur cette question de la propriété des
entreprises, QS compte « instituer
une banque d’État, soit par la création d’une nouvelle institution, soit
par la nationalisation partielle du système bancaire. »
Il compte également « placer l’industrie minière sous contrôle public » et de faire la même chose avec l’industrie forestière, ce qui signifie en devenir l’actionnaire
majoritaire.
Il prévoit également « l’expansion de l’emploi public dans les services sociaux, la
construction et l’entretien d’infrastructures, l’assainissement de
l’environnement. »
Québec deviendrait donc l’employeur et le
gestionnaire du personnel d’une banque, des entreprises du secteur des mines et
de la forêt, ainsi que de milliers d’autres travailleurs, notamment des
travailleurs de la construction et des cols bleus.
La troisième question à GND est la
suivante : en quoi la propriété de ces moyens de production
permettrait-elle de mieux atteindre les objectifs de QS qu’un solide encadrement
législatif?
Réglementation abusive
Passons à la réglementation de l’activité
des entreprises privées.
« Les mises à pied importantes ou les
fermetures d’entreprise devront être étudiées et
approuvées ou refusée par une instance gouvernementale ».
La quatrième question à GND est la
suivante : si une fermeture est refusée, QS croit-il vraiment pouvoir
contraindre une entreprise à continuer d’exercer ses activités?
En cas de fermeture dans le cadre d’une
délocalisation, « Québec solidaire entend reconnaître le droit aux employé-es de reconvertir l’entreprise en
coopérative, le tout sans indemnisation
à l’employeur. »
La cinquième question à GND est la
suivante : est-ce que ça signifie que le capital de l’entreprise sera
saisi et transféré à la nouvelle coopérative, sans compensation?
Dernier élément : « Québec solidaire
prévoit obliger les employeur-es à
se doter d’un plan pour reclasser les employé-es licencié-es dans un emploi
similaire ou équivalent; à fournir la formation requise pour requalifier les
employé-es licencié-es qui n’ont pas pu se trouver un tel emploi et à
indemniser substantiellement les employé-es licencié-es qui n’ont pas pu se
trouver un emploi malgré les mesures précédentes. »
La sixième question à GND est la
suivante : pourquoi ne pas prendre collectivement en charge, tout comme
nous l’avons fait en santé, le développement et la gestion d’un système de
soutien aux travailleurs, incluant le développement de leur compétence?
Et de manière plus générale, une septième
question à GND : Comment QS peut-il croire qu’en faisant peser sur les
entreprises à la fois la menace de nationalisation, la possibilité de la saisi
sans compensation et un fardeau réglementaire hypercontraignant, il n’incitera
pas les entreprises manufacturières à quitter le Québec?
Clarifications demandées
À première vue, le programme de Québec
solidaire inquiète parce qu’il pourrait avoir des effets négatifs pour le
Québec. Ces craintes sont légitimes, c’est pourquoi les mesures annoncées par
QS doivent être expliquées et débattues maintenant et au cours des douze mois
menant à l’élection, surtout que les portes-paroles affirment vouloir prendre
le pouvoir et se disent tous les deux prêts à exercer le rôle de premier ministre.
Ces jours-ci, Québec solidaire veut parler
de salaire minimum à 15 $, des quatre semaines de vacances après un an, de
la fin des heures supplémentaires forcées et de congés chômés. Quatre mesures
intéressantes susceptibles d’améliorer la qualité de vie de nos concitoyens,
mais qui n’ont aucune chance de voir le jour si l’économie du Québec
s’effondre.
Sources :
Ils vont faire comme Mitterand et Hollande, ils vont déblatérer à gauche et gouverner à droite -de leur programme,qui sera toujours ben d'excrême-gauche... On appelle ça en la "realpolitik" en allemand.
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