mercredi 25 octobre 2017

Catalogne : ne croyez pas ce qu’on en dit, le OUI l’a emporté à 60 %

Les chiffres montrent que le camp du OUI a gagné le référendum catalan, en dépit de la violence et de l’intimidation dont il a été victime, et malgré ce qu’en disent les grands médias et les leaders politiques du « monde libre ».


Le premier octobre 2017 s’est tenu dans le plus grand désordre le référendum organisé par les extrémistes catalans.

Après le saccage de plus de 300 bureaux de vote, la disparition de centaines de milliers de bulletins et l’abstention massive des partisans du NON les autorités insurrectionnelles de Barcelone doivent l’admettre : l’exercice était illégal, illégitime et irresponsable. Elles doivent maintenant agir de manière responsable et admettre la défaite.

La presse l’a dit, la cause est entendue. Fin de l’histoire.

Imaginons une autre histoire. Celle d’un gouvernement qui veut réaliser l’indépendance de la catalogne. Et d’un régime espagnol qui adopte la ligne dure, arguant que la constitution du pays proscrit l’indépendance. Devant l’absence d’alternative, le gouvernement catalan met en branle le seul moyen démocratique de dénouer l’impasse : consulter les citoyens.

Mais, Madrid menace et fait tout en son pouvoir pour saper la légitimité du processus. On incite les partisans du NON à boycotter le scrutin, on intimide les leaders indépendantistes à coup de poursuites judiciaires et d’arrestations, on organise des raids dans plus de 300 bureaux de scrutin, on frappe, on bouscule, on matraque, on saisit des bulletins de vote...

À la télé, les images choquent. On montre quelques bureaux de scrutin où la police espagnole est intervenue violemment. On voit peu l’autre réalité, celle vécue dans 86 % des bureaux de scrutin : des Catalans qui votent dans le calme et, malgré l’incertitude, avec le sourire.

Évidemment, même si le OUI l’a emporté à 90 %, on a beau jeu de rappeler que le taux de participation de 42 % enlève toute légitimité au résultat. Surtout dans le contexte d’un boycottage massif des opposants à l’indépendance.

Mais la vérité est tenace et les chiffres loquaces.

Et si une majorité de Catalans avaient voté ?


Pour faire passer le taux de participation à 50 %, il aurait fallu que 440 000 personnes inscrites de plus soient allées voter. Même si on présume que TOUS auraient voté NON, le OUI l’aurait emporté à 75 %.

Un taux de participation encore plus élevé, 64 %, toujours en comptabilisant TOUS les votes additionnels dans le camp du NON, aurait quand même produit une victoire du OUI à hauteur de 60 %, le résultat fétiche des fédéralistes canadiens. Où sont-ils, aujourd’hui, pour reconnaître le résultat du référendum catalan ?

Dans les mêmes conditions, le OUI l’aurait quand même emporté avec la majorité simple avec un taux de participation de 77 %.

Pourquoi ne pas compter les bulletins détruits ou saisis ?


Mais tous ces calculs sont hypothétiques, alors que dans le réel, il nous faut parler des 770 000 bulletins de vote saisis ou détruits par la police espagnole. Si on peut présumer que les personnes inscrites ayant choisi de boycotter le scrutin auraient voté NON, il en va tout autrement de celles qui sont allées voter. Pour celles-ci, on doit plutôt s’aligner sur un ratio de 90 % en faveur du OUI, le même que celui des bulletins comptabilisés.

Si l’on présume que le ratio de bulletins invalides est le même que pour les bulletins comptabilisés, c’est 763 359 bulletins valides de plus qui auraient dû être comptabilisés.

Le camp du OUI aurait donc dû profiter de 688 434 votes additionnels. Le OUI aurait donc toujours obtenu 90 % des suffrages, mais cette fois avec un taux de participation de 57 %...

Pour revenir au nombre fétiche des fédéralistes canadiens, le 60 % d’appuis au OUI aurait alors été atteint avec un taux de participation légèrement supérieur à 84 %, même si tous les votes additionnels étaient allés dans le camp NON. 

Au Québec, en 1980, le taux de participation avait été de 85,61 % et il ne serait venu à personne l’idée de contester la légitimité d’une victoire à 60 %.

En terminant, dans ce scénario, même avec un taux de participation de 99 %, où tous les citoyens inscrits restés à la maison se seraient déplacés pour voter NON, et en éliminant les bulletins invalides, le OUI l’aurait tout de même emporté à prés de 52 %.

Le référendum catalan a été volé par Madrid, au vu et au su de la communauté internationale, au premier chef l’Europe, qui n’a pas bronché. Dans le contexte où la démocratie, à bout de souffle, voit émerger partout l’extrême droite, le comportement autoritaire du gouvernement espagnol n’a rien de rassurant. Malheureusement, on dirait bien que ce n’est pas fini.



jeudi 31 août 2017

7 questions à GND


Dans un communiqué de presse du 27 août dernier, Gabriel Nadeau-Dubois affirmait : « À partir de maintenant, on va se faire entendre sur l’économie. » Voilà une très bonne nouvelle, car les propositions de Québec solidaire en cette matière se révèlent surprenantes et les électeurs seraient bien inspirés d’en prendre connaissance.

Car si la marque QS a réussi à se positionner dans le cœur de nombreux progressistes comme dépositaire unique de la vertu, au moment de choisir un gouvernement, on ne peut pas s’en tenir aux objectifs affichés par les partis. On ne compte plus dans l’histoire le nombre de partis animés de nobles ambitions qui ont finalement érigés des régimes désastreux pour les droits de la personne et pour l’économie.

On peut difficilement remettre en cause la volonté de QS de vouloir le mieux pour ses concitoyens, mais il serait temps de creuser pour savoir comment il compte y arriver. Quoi de mieux que de fouiller un peu dans le programme du parti, mis à jour au 11e congrès de mai 2016, qui incarne, « dans les sphères de l’économie, du travail et de l’environnement, le rendez-vous auquel Québec solidaire convie la population québécoise. »

Exit le capitalisme


Bien des progressistes croient que le capitalisme, en dépit de ses limites, reste le meilleur système économique pour favoriser le développement individuel et collectif. Ils croient que la combinaison de la propriété privée et de l’intérêt personnel répond à un trait fondamental de la nature humaine qui ne peut être ignoré. Ils constatent toutefois que le capitalisme débridé est aussi source de misère et d’injustice et s’entendent sur la nécessité pour l’État de l’encadrer. C’est quant à la nature et à l’ampleur de l’encadrement optimal que les désaccords surviennent.

Mais chez QS, on va plus loin…

« Québec solidaire vise, à long terme, la socialisation des activités économiques. Ce processus de transformation sociale reposera, notamment, sur une économie publique forte (secteur des services publics, société d’État et nationalisation de grandes entreprises dans certains secteurs stratégiques). On concède toutefois qu’«Une certaine place au secteur privé sera maintenue, particulièrement en ce qui a trait aux PME.»

Quoique les PME constituent la très grande majorité des entreprises d’ici, le Québec compte tout de même quelque 600 grandes entreprises représentant plus de 200 000 travailleurs.

La première question à GND est la suivante : quelles entreprises parmi les Metro, Jean Coutu, CGI et les autres seront nationalisées et exploitées par l’État québécois?

Gestion démocratique?


Le programme ajoute que les entreprises nationalisées “devront s’inscrire dans le cadre d’une planification nationale et démocratique et d’un mode de gestion décentralisée. Aussi, l’administration générale et la fixation d’objectifs particuliers de ces entreprises devront avoir lieu au sein d’instances démocratiques régionales ou nationales dont la composition assurera une représentation réelle de l’ensemble de la société (salarié-es de l’entreprise, représentant-es de l’État, élu-es régionaux, groupes de citoyen-nes, Premières Nations, etc.). Finalement, ce n’est pas le gouvernement ou ses hauts fonctionnaires qui devront voir à l’organisation du travail au sein de ces entreprises, mais les employé-es eux-mêmes (autogestion).”

Les entreprises québécoises doivent être de plus en plus agiles pour faire leur place dans un environnement où le changement s’accélère sans cesse. C’est un défi. Quant à QS, champion autoproclamé des processus de prise de décision démocratiques, il a quand même mis plus d’un an pour répondre à la proposition de convergence souverainiste…

Dans ce contexte, la seconde question à GND est la suivante : concrètement, à quoi ressembleraient le mode de « planification nationale », les « instances démocratiques régionales et nationales » et l’« autogestion » des entreprises nationalisées?

État propriétaire


Sur cette question de la propriété des entreprises, QS compte « instituer une banque d’État, soit par la création d’une nouvelle institution, soit par la nationalisation partielle du système bancaire. »

Il compte également « placer l’industrie minière sous contrôle public » et de faire la même chose avec l’industrie forestière, ce qui signifie en devenir l’actionnaire majoritaire.

Il prévoit également « l’expansion de l’emploi public dans les services sociaux, la construction et l’entretien d’infrastructures, l’assainissement de l’environnement. »

Québec deviendrait donc l’employeur et le gestionnaire du personnel d’une banque, des entreprises du secteur des mines et de la forêt, ainsi que de milliers d’autres travailleurs, notamment des travailleurs de la construction et des cols bleus.

La troisième question à GND est la suivante : en quoi la propriété de ces moyens de production permettrait-elle de mieux atteindre les objectifs de QS qu’un solide encadrement législatif?

Réglementation abusive


Passons à la réglementation de l’activité des entreprises privées.

« Les mises à pied importantes ou les fermetures d’entreprise devront être étudiées et approuvées ou refusée par une instance gouvernementale ».

La quatrième question à GND est la suivante : si une fermeture est refusée, QS croit-il vraiment pouvoir contraindre une entreprise à continuer d’exercer ses activités?

En cas de fermeture dans le cadre d’une délocalisation, « Québec solidaire entend reconnaître le droit aux employé-es de reconvertir l’entreprise en coopérative, le tout sans indemnisation à l’employeur. »

La cinquième question à GND est la suivante : est-ce que ça signifie que le capital de l’entreprise sera saisi et transféré à la nouvelle coopérative, sans compensation?

Dernier élément : « Québec solidaire prévoit obliger les employeur-es à se doter d’un plan pour reclasser les employé-es licencié-es dans un emploi similaire ou équivalent; à fournir la formation requise pour requalifier les employé-es licencié-es qui n’ont pas pu se trouver un tel emploi et à indemniser substantiellement les employé-es licencié-es qui n’ont pas pu se trouver un emploi malgré les mesures précédentes. »

La sixième question à GND est la suivante : pourquoi ne pas prendre collectivement en charge, tout comme nous l’avons fait en santé, le développement et la gestion d’un système de soutien aux travailleurs, incluant le développement de leur compétence?

Et de manière plus générale, une septième question à GND : Comment QS peut-il croire qu’en faisant peser sur les entreprises à la fois la menace de nationalisation, la possibilité de la saisi sans compensation et un fardeau réglementaire hypercontraignant, il n’incitera pas les entreprises manufacturières à quitter le Québec?

Clarifications demandées


À première vue, le programme de Québec solidaire inquiète parce qu’il pourrait avoir des effets négatifs pour le Québec. Ces craintes sont légitimes, c’est pourquoi les mesures annoncées par QS doivent être expliquées et débattues maintenant et au cours des douze mois menant à l’élection, surtout que les portes-paroles affirment vouloir prendre le pouvoir et se disent tous les deux prêts à exercer le rôle de premier ministre.

Ces jours-ci, Québec solidaire veut parler de salaire minimum à 15 $, des quatre semaines de vacances après un an, de la fin des heures supplémentaires forcées et de congés chômés. Quatre mesures intéressantes susceptibles d’améliorer la qualité de vie de nos concitoyens, mais qui n’ont aucune chance de voir le jour si l’économie du Québec s’effondre.

Sources :